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Le numérique, une compétence clé pour tous les acteurs de la construction et rénovation hors-site

Published 19th Mai 22 - by Frédérique Josse

Le numérique à l’assaut de la modernisation du BTP

Si l’on devait traduire le BTP par une allégorie culinaire, ce serait sans nul doute un millefeuille. Plusieurs couches, qui se superposent dans un fragile équilibre, pour un rendu, certes, superbe, mais légèrement “pesant”. C’est là qu’intervient précisément le génie numérique. L’objectif ? Alléger, faciliter et perfectionner.

“Le BTP, c’est la filière la moins digitalisée de toute l’économie” lance tout de go Charles Guilhem, co-fondateur de Clovis, une application de pilotage de projet pour les professionnels de la construction, de l’architecture et de l’immobilier. Le secteur en bénéficie pourtant déjà, notamment grâce aux process et méthodes issus de l’industrie apparus il y a une plusieurs années. Plateformes d’échanges collaboratives, outils de simulation comme le CAO (conception assistée par ordinateur), BIM (Building Information Modeling), standardisation,  automatisation, robotisation (notamment avec le design for manufacturing and assembly), modélisation…

Avec la maturité de ces nouvelles technologies, les professionnels de la construction bénéficient de nombreux intervenants pour les acculturer à ces solutions personnalisées, explique Gaëlle Vernerey, ingénieur Commercial chez Arkance System, qui aide les entreprises à gagner en performance grâce à ces solutions. L’intérêt du numérique, poursuit l’experte, est d’optimiser les processus de conception, pour améliorer la flexibilité, la productivité et le travail collaboratif, mais aussi éviter les erreurs humaines et limiter le bilan carbone des chantiers. “C’est aussi ce que propose la construction hors-site, indique Gaëlle Vernerey : faire en sorte que ces deux mondes très différents, industrie et bâtiment, se rencontrent, se parlent et travaillent ensemble, pour une meilleure performance écologique et économique”. Même son de cloche chez Charles Guilhem, pour qui “le hors-site constitue réellement une bonne partie de l’avenir de la construction, car il va répondre à beaucoup d’enjeux écologiques, économiques et de qualité”.

Sortir de l’approche en silo

Hélas, malgré toutes ces avancées notables, “l’approche numérique se fait encore aujourd’hui en ordre dispersé, regrette Pierre Dessort, Directeur Process, Technique et Transformation Métier chez Nacarat, un groupe immobilier au statut coopératif, qui réinvestit une part de ses résultats dans des actions d’utilité sociale/sociétale. “Oui, beaucoup d’entreprises utilisent le numérique, mais souvent avec des rendus qui ne dialoguent pas entre eux. Chacun travaille sur ses outils et, sans mission de synthèse finale, on retrouve in fine les mêmes problématiques à l’exécution”.

Pour Pierre Dessort, l’une des solutions réside donc dans la généralisation de la maquette numérique, “une interface permettant l’interopérabilité entre tous les acteurs du bâtiment, de la conception à la construction”. Grâce à l’intelligence artificielle et sous le pilotage d’un manager BIM, la maquette numérique permet aussi à identifier les réalisations impossibles. Reste, toutefois, à équiper et former chaque acteur de l’écosystème à ces outils numériques pour lesquels, soyons honnêtes, il faut nourrir un certain appétit “geek”, souligne Pierre Dessort. “Le fait que l’on doive systématiquement faire appel à un BIM manager pour assister les entreprises qui ne maitrisent pas la maquette numérique fait qu’aujourd’hui, le recours à cette technologie est plus souvent interprété comme une charge qu’un atout”.

Le numérique est donc bel et bien une compétence clef dans le bâtiment, mais encore insuffisamment infusée par la corporation. Dommage, quand on sait que les données sont aussi une source d’information extraordinaire, qui permet, comme Nacarat le fait, d’appréhender l’économie des projets et l’efficacité des plans. Ou encore, comme Clovis, de rassembler en un seul lieu une ressource inouï de savoir-faire jusqu’ici généralement transmis à l’oral.

Plus de fluidité, moins de paperasse et plus de liens

C’est précisément tous ces freins (approche en silo, outils complexes) qui ont conduit Charles Guilhem et ses associés à imaginer la plateforme Clovis, dont la croissance très rapide (+20% de croissance d’un mois sur l’autre), prouve le fort engouement pour la digitalisation. L’objectif principal du logiciel ? “Accompagner la transition digitale auprès de tous les acteurs du bâtiment grâce à une solution simple, ergonomique et intuitive, accessible à tous”, explique le co-fondateur de la startup. La formation au logiciel se fait en général sur un “onboarding” d’1h00, souvent en visio, pour créer le compte et démarrer le premier projet. “Pour le reste, explique Charles Guilhem, nous avons un “helpcenter” intégré dans l’app, qui permet à tous les utilisateurs de faire une demande en ligne”.

Pour cet entrepreneur, les enjeux du numérique sont énormes pour le bâtiment. Car au-delà de la réduction de l’empreinte carbone permise par la diminution des déplacements et de l’utilisation du papier, c’est toute l’image du métier qui s’en verrait améliorée. “On facilite la vie au quotidien, en mettant en place des process simples, partagés et automatisés, sur le chantier comme au bureau. Cela améliore de fait l’image employeur d’entreprises de la construction qui peinent à recruter”.

De quoi professionnaliser un secteur qui a très longtemps fonctionné sur le mode artisanal. Mais aussi, insiste Charles Guilhem, de rapprocher les chapelles ! “Le numérique amène une approche horizontale, pour que tout le monde travaille sur une plateforme ouverte, avec le même niveau d’information, ce qui facilite la compréhension et les relations des différents métiers les uns avec les autres.  Bref, cela change complètement l’approche de la construction et s’inscrit dans une démarche hors site”.